"Avec vue sur l'Arno" d'E. M. Forster

Publié le par Michel Sender

"Avec vue sur l'Arno" d'E. M. Forster

« La Signora n’avait pas le droit de nous faire ça, dit Miss Bartlett, — non, pas le droit. Elle nous avait promis deux chambres au midi avec vue sur le paysage, et attenantes, or, ces chambres donnent au nord, donnent au nord sur une cour, et elles sont très loin l’une de l’autre. Oh ! Lucy !

— Et elle est cokney 1 par-dessus le marché, dit Lucy qu’avait assombrie l’accent inattendu de la Signora. On se croirait à Londres. » [*]

1 Équivalent londonien de Parigotte. (N. du T.)

 

Avec vue sur l’Arno — mieux connu depuis le film de James Ivory comme Chambre avec vue, plus fidèle à l’original anglais : A  Room with a View —, par son titre français et la mention de l’Arno, nous plonge plus rapidement dans Florence et l’Italie du début du XXe siècle où les touristes anglais effectuaient leur Tour.

Dans cette pension Bertolini en 1905, Lucy Honeychurch, chaperonnée par Miss Bartlett, une cousine plus âgée et moins fortunée, y fait la connaissance des Emerson (George et son père) et y retrouve le révérend Mr. Beebe, futur pasteur de sa paroisse de Summer Street. Très vite les Emerson acceptent d’échanger leurs chambres pour que les deux femmes puissent avoir une vue sur l’Arno.

Dans ces relations compassées, qui gardent même en voyage les distances sociales propres à l’Angleterre edwardienne, Lucy va néanmoins — à la faveur d’un incident près des Offices ou lors d’une sortie à Fiesole — se rapprocher du jeune George Emerson mais sans s’avouer la profondeur de son attachement pour lui.

Rentrée à Londres et dans le Surrey à Windy Corner, elle contracte des fiançailles avec un certain Cecil Vyse, un homme prétentieux et assommant qui déplaît à tout l’entourage. Cependant, à la faveur de quiproquos et de nouveaux échanges imprévus, Lucy va revoir George Emerson et finalement rompre avec Cecil…

Le roman se termine ainsi à Florence où Lucy et George, maintenant mariés, contemplent une nouvelle fois l’Arno ensemble : « Ils écoutèrent gronder le fleuve emportant les neiges d’hiver à la Méditerranée », conclut l'auteur.

Dans ses romans, E. M. Forster —  Avec vue sur l’Arno est son troisième après Monteriano et Le plus long des voyages — dénonce les carcans et les préjugés moraux qui écrasent ses personnages et dont ils cherchent à tout prix à se libérer : « J’ai agi selon la vérité », se console George face à l’adversité familiale qui demeure.

 

Michel Sender.

 

[*] Avec vue sur l’Arno (A room with a View, 1908) d’E. M. Forster, traduit de l’anglais par Charles Mauron [« Pavillons », Robert Laffont, 1947], Le Livre de Poche, Paris, 4e trimestre 1970 ; 320 pages. (La présentation du Livre de Poche précise qu’Edward Morgan Forster, né en 1879, « est mort dans la nuit du 6 au 7 juin 1970 ».)

Publié dans Littérature

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