"L'Offrande lyrique" de Rabindranath Tagore
Lumière ! Où est la lumière ? Qu’elle s’anime au feu rutilant du désir !
Voici la lampe, mais sans jamais le vacillement d’une flamme — est-ce là ton destin, mon cœur ? La mort, ah ! pour toi serait de beaucoup préférable.
La misère frappe à ta porte ; son message est que ton maître est de veille et qu’il t’appelle au rendez-vous d’amour à travers l’obscurité de la nuit.
Le ciel est encombré de nuages et la pluie ne cesse pas. Je ne sais ce que c’est qui se soulève en moi ; je ne sais ce que cela veut dire.
La lueur soudaine d’un éclair ramène sur ma vue une ténèbre plus profonde, et mon cœur cherche à tâtons le sentier vers où la musique de la nuit m’appelle.
Lumière, ah ! où est la lumière ? Qu’elle s’anime au feu rutilant du désir ! Il tonne et le vent bondit en hurlant à travers l’espace. La nuit est noire comme l’ardoise. Ne laisse pas les heures s’écouler dans l’ombre. Anime avec ta vie la lampe de l’amour.
RABINDRANATH TAGORE
(1861-1941)
L’Offrande lyrique (Gitanjali), XXVII, de Rabindranath Tagore, traduit de l’anglais par André Gide, éditions de La Nouvelle Revue Française, Paris [1913] ; 7e édition, 1917 (Internet Archive, University of Ottawa).