"Testament" de Tarass Chevtchenko (Pour l'Ukraine, une et indivisible)

Publié le par Michel Sender

"Testament" de Tarass Chevtchenko (Pour l'Ukraine, une et indivisible)

« Testament.

 

Quand je mourrai, enterrez-moi

Dans une tombe au milieu de la steppe

De ma chère Ukraine,

De façon que je puisse voir l’étendue des champs,

Le Dniéper et ses rochers,

Que je puisse entendre

Son mugissement puissant.

 

Et quand il emportera de l’Ukraine

Vers la mer bleue

Le sang des ennemis, alors

Je quitterai les prairies et les montagnes

Et m’envolerai

Vers Dieu lui-même

Pour lui offrir mes prières.

                                      Mais jusque-là

Je ne connais pas de Dieu !

 

Enterrez-moi et debout !

Brisez vos fers,

Et arrosez du sang impur des ennemis

La liberté !

Puis, dans la grande famille,

La famille nouvelle et libre,

N’oubliez pas d’accorder à ma mémoire

Une bonne parole !

 

1845.

 TARASS CHEVTCHENKO

(1814-1861) » [*]

 

[*] Anthologie de la littérature ukrainienne jusqu’au milieu du XIXe siècle, page 122, avec un avant-propos de M. A. Meillet, professeur au Collège de France, Institut sociologique ukrainien, Paris, Genève et Prague, 1921 (Internet Archive et Wikisource).

"Testament" de Tarass Chevtchenko (Pour l'Ukraine, une et indivisible)

Pour l’Ukraine, une et indivisible !

 

Les déclarations récentes de Nicolas Sarkozy sur l’Ukraine — ce qui n’est pas étonnant venant d’un personnage aussi pervers et toxique — sont indignes et insupportables.

Elles rejoignent certaines voix qui, depuis le début, distillent la résignation pour le peuple ukrainien et l’acceptation du diktat russe.

Bien sûr, cela n’est pas acceptable, car RIEN ne justifie la tentative d’annexion de territoires ukrainiens ni l’annexion complète de la Crimée par la Russie.

Je suis en train de lire un roman historique russe (dont je vous parlerai probablement prochainement) où l’Ukraine et la Crimée sont extrêmement présentes (l’auteur en parle comme du Midi de la Russie), ce qui demeure la marque de l’Histoire.

Il n’en reste pas moins que l’Ukraine et l’ukrainien existaient, même si la culture dominante privilégiait le russe comme langue vernaculaire — comme la France républicaine a banni pendant longtemps l’apprentissage des langues régionales et empêché leur expression au profit du seul français.

Mais la russophonie n’excuse pas le fait de revendiquer un quelconque rattachement à la Russie. Comme si la francophonie justifiait pour la France de s’attribuer les parties de Belgique ou de Suisse qui parlent français !

Cela n’a rien à voir. Pendant longtemps, l’élite russe d’ailleurs parlait français et passait ses vacances en Crimée, dans les villes d’eaux allemandes ou sur la Côte d’Azur, notamment à Nice (ancienne ville italienne).

Le fait que Tchekhov (né à Taganrog, au bord de la mer d’Azov) résida longtemps à Yalta (à cause de la tuberculose qui le minait) ne justifie pas aujourd’hui que la Russie envahisse la Crimée !

Si la Crimée a été rattachée à l’Ukraine, c’est aussi parce que, en tant que presqu’île, elle est reliée au continent par le territoire ukrainien et non par la Russie.

Le pont de Kertch — on voit bien pourquoi Poutine a tant tenu à sa construction — n’existait pas, et, de toute façon, ce n’est pas une raison : le tunnel sous la Manche n’a pas rendu l’Angleterre française !

Bref, l’Ukraine, une et indivisible, existe : avec les aléas de l’Histoire et les populations diverses qui la composent. Comme la France, avec son Alsace-Lorraine germanique, ses Savoie italiennes, ses Pyrénées basques ou catalanes, etc.

Il n’y a pas à en démordre !

De même, rien ne justifierait une russophobie : la langue russe n’est pas responsable de Poutine, même si l’impérialisme allemand ou le nazisme ont longtemps provoqué en leurs temps un anti-germanisme tenace et tout aussi arbitraire.

 

Michel Sender.

Publié dans Littérature

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